Ursula Heijs Voorhuis 1932-2021

ursula-heijs-voorhuis-marchande-hollandaise-collectionneuse-ibeji-yoruba-nigeria
ursula-heijs-voorhuis-marchande-hollandaise-collectionneuse-ibeji-yoruba-nigeria

Ursula Heijs-Voorhuis, née en 1932, a marqué l’histoire de l’art non européen aux Pays-Bas, sa vaste collection d’art Yoruba révèle un parcours exceptionnel, guidé par une passion sans faille pour l’art et l’apprentissage.

Pionnière dans son domaine, Ursula est l'une des premières femmes aux Pays-Bas à avoir ouvert une galerie d'art non européen, dans un marché alors dominé par les hommes au début des années 1970. Pourtant, elle minimise ce fait, préférant se concentrer sur sa carrière de collectionneuse et galeriste. Sa détermination a été nourrie par l’encouragement de ses proches, qui l’ont poussée à franchir le pas malgré ses hésitations. « Je ne savais rien ! » se souvient-elle avec amusement, évoquant ses débuts modestes dans le monde de l'art, où elle ne maîtrisait ni la négociation ni la valeur des œuvres.

Grâce à un soutien familial et académique, notamment de l’Université de Nimègue où elle avait étudié la sociologie, Ursula s’est lancée dans cette aventure, conciliant enseignement et gestion de sa galerie. Des décennies plus tard, heureuse d’avoir échappé à la faillite tout en ayant bâti des relations riches et significatives avec de nombreuses personnes sa maison à Berg en Dal, débordante d'art, était un lieu d'accueil pour tous.

yoruba-galerie-ursula-heijs-voorhuis-ibeji-jumeaux-hohovi-marchande-pays-bas-hollande
yoruba-galerie-ursula-heijs-voorhuis-ibeji-jumeaux-hohovi-marchande-pays-bas-hollande

C’est aux côtés de son père, un collectionneur d'antiquités, qu’Ursula découvre dès son plus jeune âge le monde de l’art. Toutefois, c’est au Musée de l’Afrique à Berg en Dal, dirigé alors par les missionnaires de la Congrégation du Saint-Esprit, qu’elle fait ses premières armes en tant que professionnelle de l’art. Travaillant bénévolement, elle s’immerge dans la culture africaine et acquiert ses premières pièces.

Passionnée en particulier par l’art nigérian, notamment les œuvres des Yoruba, Ursula développe une connexion particulièrement forte avec cette culture. Elle entretient d'ailleurs une relation privilégiée avec Hans A. Witte, expert des sociétés Yoruba et conservateur à l'Afrika Museum , avec qui elle travaille à identifier et documenter de nombreuses sculptures de jumeaux Ibeji. Ensemble, ils parviennent à attribuer ces œuvres à des ateliers ou sculpteurs précis, faisant émerger de l’anonymat plusieurs artistes africains.

bureau-ursula-heijs-voorhuis-afrika-museum-berg-en-dal-hans-witte-ibeji-nigeria-yoruba
bureau-ursula-heijs-voorhuis-afrika-museum-berg-en-dal-hans-witte-ibeji-nigeria-yoruba

En l’espace de six décennies, Ursula Heijs-Voorhuis a su bâtir une collection Yoruba d'une ampleur remarquable, comprenant plus de 4 500 pièces, dont une part significative est dédiée aux statuettes ibeji, emblèmes du culte des jumeaux au Nigéria. Son intérêt ne s'est pas limité aux seules sculptures yoruba : elle a également rassemblé un ensemble impressionnant de jumeaux Hohovi des Fon, Togbovi des Adja et Venavi des Ewe, consolidant ainsi une collection qui reflète l'étendue et la diversité des pratiques liées aux jumeaux à travers l'Afrique de l'Ouest.

Cette collection unique par son volume et sa qualité a rapidement suscité l'intérêt des institutions muséales et des collectionneurs européens, plaçant Ursula Heijs-Voorhuis au rang des figures incontournables de l'étude de l'art tribal africain, et plus spécifiquement du culte des jumeaux. Sa passion pour les ibeji, en particulier, lui a permis de nouer un lien intime avec ces objets rituels, qu'elle considérait non seulement comme des œuvres d'art, mais aussi comme des témoins spirituels d’une tradition culturelle complexe et profondément ancrée dans la vie sociale yoruba.

La disparition d'Ursula en 2021, à l'âge de 89 ans, a laissé un vide immense dans le domaine de l'art tribal. Son dévouement infatigable à l'étude et à la préservation des sculptures de jumeaux a façonné le regard des amateurs et des chercheurs du monde entier. En tant que figure de proue dans la recherche sur les ibeji, elle a contribué à élargir la compréhension de ces œuvres au-delà de leur esthétique, en explorant leur signification religieuse, symbolique et anthropologique. Son héritage reste vivace et continue d’inspirer tant les spécialistes que les amateurs d’art africain.

ursula heijs voorhuis vendeuse et collectioneuse d'ibeji aux pays bas
ursula heijs voorhuis vendeuse et collectioneuse d'ibeji aux pays bas

Les photos illustrant cet article sont tirées d'un très beau et émouvant reportage autour d'Ursula Voorhuis (en Néerlandais), réalisé par Zbigniew Szendera en 2014, que vous pouvez retrouver ici : https://vimeo.com/118421341